L’ère du numérique : une accumulation de clichés et d’inquiétudes
Dans cette ère numérique, prendre des photos n’a jamais été aussi facile et accessible. Mais pour Cécile Novella, une femme organisée et mère de trois enfants, chaque mois s’impose la même priorité : trier les photos. Avec un nombre incalculable de clichés stockés sur disques durs et autres supports digitaux, cette tâche devient rapidement écrasante.
S’entretenir avec les Français au sujet de leurs photos de famille revient souvent à parler de « ce qu’il aurait fallu faire », dans un monde de résolutions inassouvies et de préoccupations orchestrées. Raconter l’histoire de la perte d’un enfant en images depuis sa naissance brutalement interrompue, ou celle du divorce où tout est perdu quand le conjoint s’en va avec le contenu informatique. Ou encore hériter d’un CD sûrement illisible suite à un décès ou découvrir un téléphone volé, un support externe cassé ou une mise à jour logicielle fatale.
Les albums numériques vs traditionnels
- Claire Mathijsen, psychologue parisienne, réalise des albums photos depuis 1979.
Elle réalise ses albums photos sur des sites internet comme-celui d’Innocence, peut-être entre cinquante et cent albums, tous soigneusement alignés avec des couvertures similicuir de différentes couleurs pour chaque année, avec du papier calque et des légendes calligraphiées. - En Europe de l’Ouest, on comptabilise environ 638 millions de clichés pris chaque jour à partir de smartphones.
- Les Français prennent en moyenne 99 photos par mois sur tous les appareils capables de capturer des images.
Avec l’avènement des smartphones, les images sont devenues un langage permettant à chaque membre de la famille de s’exprimer. Parmi ces centaines de clichés accumulés chaotiquement dans nos dispositifs électroniques se trouvent des souvenirs précieux : moments du quotidien, premiers pas d’un enfant, etc.
Vers une mémoire numérique sans limite : nostalgie ou réalité ?
Un jour viendra où il faudra vider tout cet amas d’images et l’archiver dans un disque dur externe ou dans le nuage de stockage d’un service en ligne. On y dépose souvent ces quelque mille photos, sans réel tri ni prise de sens, berçant notre esprit dans un rêve de mémoire infinie. Si ce procédé peut sembler thérapeutique et cathartique, procurant un soulagement temporaire, Claudine Veuillet-Combier et Emmanuel Gratton, enseignants chercheurs en psychologie à l’université d’Angers et organisateurs d’une conférence sur les images familiales, rappellent l’importance de revenir aux fondamentaux et offrir une signification plus profonde à notre patrimoine visuel.
Trouver un moyen d’honorer nos trésors photographiques
Afin de maîtriser cette surcharge photographique, il est essentiel de prendre le temps de sélectionner et organiser nos clichés les plus précieux. Qu’il s’agisse de créer un album numérique unique ou une galerie en ligne dédiée à certains événements spécifiques, le fait d’accorder du temps pour trier et organiser ces moments capturés permet de leur donner vie au-delà des confins sombres et lointains des disques durs inexplorés.
Compléter notre propre histoire avec un regard sensible et sélectif
Laissons derrière nous l’époque où nous accumulions frénétiquement toutes ces images que l’on agrège jour après jour depuis nos téléphones, ordinateurs ou autres appareils électroniques.
En prenant soin de choisir et partager nos souvenirs avec ceux qui nous sont chers, nous offrons ainsi une dimension humaine et personnelle à la mémoire collective, nous inscrivant dans l’intimité familiale à travers un médium intemporel.